Sur le papier, l’idée de nommer le producteur de cinéma Dominique Boutonnat, à la tête du Centre national du cinéma, paraissait plutôt une bonne chose. Pour une fois, ce ne serait pas un technocrate, mais bien une personne issue du terrain qui dirigerait cette instance. Cependant, cette nomination ne fait pas vraiment que des heureux. En cause notamment, un précédent rapport fait par l’intéressé qui inquiète certains professionnels du 7e art français.
Dominique Boutonnat, vient d’être nommé à la tête du CNC (Centre national du cinéma) en remplacement de l’ex-présidente Frédérique Bredin. Pour les fans de cinéma, il est tout d’abord le producteur de films, comme Intouchable, Polisse ou L’arnacœur. Son nom est aussi connu dans le milieu de la musique puisque son frère n’est autre que Laurent Boutonnat, le compositeur des succès de Mylène Farmer et le réalisateur de nombreux de ses clips. De son côté, après avoir travaillé dix ans chez l’assureur Axa, Dominique se lance dans le cinéma en 2005. Maintenant, âgé de 49 ans, ce financier du cinéma est à la base, diplômé d’un troisième cycle à Sciences Po. Il s’est ensuite spécialisé dans le financement de la création cinématographique et audiovisuelle, en se servant de fonds, avec les dispositifs ISF-PME et en les adaptant au cinéma.
C’est la première fois, que le CNC ne sera pas dirigé par un haut fonctionnaire. Cet organisme a été créé en 1946, il joue un rôle important dans le système français avec des dépenses de soutien de quelque 700 millions d’euros. En ces périodes de vaches maigres, il ne pouvait pas être épargné par la critique, et un rapport émis par deux députés, lui reproche un manque de transparence, de concertation, mais aussi un nombre trop important de films aidés.
Justement, à propos de rapport, c’est bien ce qui inquiète les détracteurs du nouvel arrivant. Ils connaissent sa vision des choses, au vu des résultats de son rapport commandé par Bercy et le ministère de la Culture sur le financement du cinéma remis en mai. Pour Dominique Boutonnat, le CNC doit avoir un rôle de régulateur et non plus d’instigateur et de financeur. Pour cela, il veut développer la part du financement privé dans le cinéma, via des fonds d’investissements et le développement de la blockchain, une technologie suscitant l’engouement.
C’est exactement ce que le gouvernement veut entendre pour réduire le budget du CNC. L’Elysée met en avant, « la première fois qu’un professionnel du cinéma est choisi pour diriger le CNC, il devra mener à bien la transformation du CNC pour l’adapter aux bouleversements du secteur tout en respectant les fondamentaux du cinéma français ». Il apparaît en effet, plus difficile de financer juste une vague idée et de la nouveauté pour de la nouveauté.
Tout ceci ne fait pas l’unanimité dans la profession, une grande partie du cinéma français, s’emporte contre cet homme réputé proche du président Macron. Plus de 70 cinéastes, ont émis des inquiétudes dans une tribune parue dans Libération.
Parmi eux, Jacques Audiard, Nicole Garcia, Michel Hazanavicius, Pascale Ferran, Cédric Klapisch entre autres, craignent de voir disparaître une volonté créatrice au détriment de projets avant tout rentables. Si des aides à la création ne sont plus là, les films d’auteurs feront place de plus en plus, à des supers productions. Plus de films dérangeants, déroutants, innovants, avant-gardistes et surprenants, la production française ne pourra plus se faire valoir d’une originalité quelconque. La logique commerciale au détriment de la créativité.
Crédit photo : peter-lewicki
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